Aux États-Unis, les parents craignent davantage les effets des écrans que la drogue et l’obésité

Photo: Epoch Times/Shutterstock
Les soucis de santé physique comme le tabagisme ou l’obésité figurent désormais au bas de classement, tandis que la santé mentale occupe la cinquième place. Les trois premières préoccupations restent inchangées par rapport à l’an dernier – toutes liées à la technologie -, avec la dépression, l’anxiété et le stress juste derrière, étroitement associés à l’usage du numérique.

Les 10 principales préoccupations des parents américains (Epoch Times).
En 2025, réseaux sociaux et usage excessif des écrans occupent les deux premières places, trois parents sur quatre se disant inquiets.
Si aujourd’hui les réseaux sociaux sont la priorité numéro un, il y a deux ans, c’était le temps d’écran qui arrivait en tête, suivi de très près par les réseaux sociaux. Depuis, ces deux menaces se disputent la première place dans l’esprit des parents.
Les réseaux sociaux avaient fait leur entrée dans le sondage dès 2020, directement à la première position. Une ascension fulgurante, alimentée par la pandémie, qui a plongé les enfants encore plus longtemps dans le monde numérique, entre école à distance et besoin de lien social.
Plus de 60 % des parents se disent également préoccupés par la santé mentale et par une mauvaise alimentation. Les problèmes liés à la santé psychologique apparaissent d’ailleurs dans l’enquête depuis plus de 15 ans.
Le harcèlement et le cyberharcèlement, qui avaient atteint la deuxième place en 2020 sous l’effet de l’explosion du temps passé en ligne, ont reculé depuis : cinquièmes en 2023, ils ne se classent plus qu’au neuvième rang cette année.
Pour la psychiatre de l’enfant et de l’adolescent Andrea Diaz Stransky, les écrans représentent un défi propre à notre époque. « Ils paraissent particulièrement préoccupants aux yeux des parents parce qu’ils sont omniprésents, peu encadrés et profondément liés au développement mental, émotionnel et social des enfants », a-t-elle expliqué à Epoch Times. Un usage excessif et non éducatif perturberait le sommeil, réduirait l’activité physique, fragiliserait la relation parent-enfant et, au final, affecterait la santé mentale.
Cette inquiétude est aggravée par un renversement des rôles que de nombreux parents trouvent déstabilisant. Sarah J. Clark a fait remarquer que grandir aujourd’hui est très différent de ce que ces parents ont connu lorsqu’ils étaient enfants, non pas à cause des appareils eux-mêmes, mais parce que les enfants surpassent souvent leurs parents en matière de connaissances technologiques. « Cela peut rendre les parents un peu anxieux, car ils sont censés être ceux qui savent et qui ont une longueur d’avance, mais avec la technologie, les rôles s’inversent, et cela se produit très tôt », a-t-elle déclaré.
Contrairement aux menaces physiques, visibles et plus faciles à contrer, les dangers numériques restent discrets. Une étude suggère que la majorité des parents se sentent démunis face à ces risques, incapables d’offrir une protection réellement efficace.
Des études récentes confirment ces craintes. Yunyu Xiao, professeure adjointe en sciences de la santé des populations à Weill Cornell Medicine et New York Presbyterian, a publié une recherche montrant que les usages addictifs des réseaux sociaux et du téléphone portable sont associés à un risque accru d’idées et de comportements suicidaires chez les adolescents.
« Ces habitudes perturbent le sommeil, réduisent les interactions sociales directes et exposent les jeunes à des contenus nocifs, du cyberharcèlement aux comparaisons irréalistes », a-t-elle expliqué. À long terme, elles fragilisent l’estime de soi, accentuent l’isolement et aggravent les vulnérabilités psychiques.
« Dans la grande majorité des cas, ces crises verbales – parfois physiques – éclatent quand un parent retire un téléphone ou une console », explique-t-il, y voyant une forme de « sevrage de dopamine ».
Passer trop de temps devant les écrans prive les adolescents d’un développement social et émotionnel essentiel, a souligné Andrea Diaz Stransky. Ils perdent des occasions de partager des moments avec leurs pairs, de pratiquer une activité physique ou de s’investir dans des loisirs concrets qui les aident à gérer le stress et à développer leur résilience émotionnelle.
À un niveau plus subtil, les écrans érodent des compétences essentielles, souligne Tom Kersting. « L’un des effets les plus marquants est la diminution des aptitudes sociales et de l’intelligence émotionnelle. » Ces compétences, cruciales pour l’empathie et les interactions sociales, se développent uniquement dans le monde réel. « La seule manière de renforcer l’intelligence émotionnelle est l’interaction face à face avec d’autres êtres humains – quelque chose dont nos enfants manquent cruellement. »
Le manque de sommeil est devenu endémique, notamment chez les collégiens et lycéens dont les parents autorisent les téléphones dans les chambres la nuit. Dans une enquête menée par Tom Kersting auprès de 100 lycéens en qui il avait confiance, 93 déclaraient se coucher entre 1 h 00 et 4 h 00 du matin les soirs d’école, souvent à l’insu de leurs parents. « Les écrans et la privation de sommeil favorisent ensemble les problèmes de comportement, émotionnels, l’anxiété et les difficultés scolaires », note-t-il.
La santé physique en pâtit également. Andrea Diaz Stransky rappelle qu’un mode de vie sain repose sur l’exercice régulier, une alimentation équilibrée et un bon sommeil – autant de facteurs perturbés par l’usage excessif des écrans. Tom Kersting ajoute que la sédentarité expose les enfants à la publicité pour des aliments peu sains, instaurant un cercle vicieux de mauvaises habitudes.
Tous les usages d’écrans ne se valent pas, a précisé Andrea Diaz Stransky. « De la même manière que nous aidons nos enfants à équilibrer leur alimentation et à limiter la malbouffe, il faut développer des stratégies pour leur apprendre l’hygiène numérique et des usages d’écran réfléchis. »
Yunyu Xiao partage cet avis : le nombre total d’heures en ligne ne raconte qu’une partie de l’histoire. « Notre étude montre que ce n’est pas seulement le temps passé en ligne qui compte, mais aussi la manière et les raisons de l’utilisation. »
Parmi les signaux d’alerte d’une relation malsaine avec les appareils chez un adolescent :
• Perte de contrôle : tentatives répétées et infructueuses de réduire l’usage.
• Altération fonctionnelle : baisse des résultats scolaires, retrait social ou abandon de loisirs, perturbation importante du sommeil.
• Dépendance émotionnelle : anxiété, irritabilité ou malaise lorsqu’il n’est pas connecté.
• Exposition au risque : fréquentation de communautés nocives, cyberharcèlement ou contenus déclencheurs.
Les adultes doivent aussi s’inquiéter si les jeunes privilégient systématiquement les écrans au détriment de besoins essentiels comme manger, dormir ou passer du temps avec les autres hors ligne, a ajouté Yunyu Xiao.
Bien que conscients des risques, de nombreux parents confient encore des appareils à leurs enfants dès 10 ans ou un peu plus, par peur qu’ils se sentent exclus, note Tom Kersting. « C’est un problème de conformité sociale. Ils prennent le risque en espérant que ça ne concernera pas leur enfant. Ce n’est pas un pari qui vaut la peine. »
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