Opinion
Le repli tactique de Pékin révèle pourquoi Xi Jinping a cédé lors des dernières négociations commerciales avec Donald Trump
Les difficultés économiques et l’instabilité politique chinoises ont forcé Xi à lâcher prise lors des discussions commerciales, signalant une trêve fragile plutôt qu’une paix réelle.

(De g. à dr.) Le représentant américain au Commerce Jamieson Greer, le secrétaire au Commerce Howard Lutnick, le secrétaire d’État Marco Rubio, le président Donald Trump et le secrétaire au Trésor Scott Bessent participent aux négociations avec le dirigeant chinois Xi Jinping sur la base aérienne de Gimhae, à Busan, Corée du Sud, le 30 octobre 2025.
Photo: Andrew Caballero-Reynolds/AFP/Getty Images
La rencontre du 30 octobre entre le président américain Donald Trump et le chef du Parti communiste chinois (PCC) Xi Jinping marque la tentative la plus significative de remise à plat des relations commerciales sino-américaines depuis la reprise des négociations au printemps.
À l’issue de la réunion, Washington a annoncé la structure d’un accord commercial américano-chinois. De nombreux observateurs jugent qu’une des parties a dû consentir d’importantes concessions pour sortir de l’impasse.
Qui a concédé le plus ?
Sur les droits de douane, les États-Unis ont accepté de réduire le taux global appliqué aux importations chinoises, passant de 57 % à 47 %. Cela inclut les 25 % du dispositif « Section 301 » ciblant le vol de propriété intellectuelle et les pratiques déloyales, la taxe de 10 % sur le fentanyl imposée pendant le second mandat, les droits de douane liés à la sécurité nationale instaurés sous « Section 232 », et les droits de réciprocité « Liberation Day » introduits le 2 avril.
Washington garde néanmoins suffisamment de pressions douanières pour préserver son levier de négociation, Pékin ayant pour sa part lâché davantage. La Chine annonce la suspension du droit de 24 % imposé aux produits américains en avril, et la suspension des taxes jusqu’à 15 % sur certains produits agricoles américains dès le 10 novembre.
Sur les exportations de terres rares, domaine jusque-là monopolisé par Pékin, la Chine accepte de différer sa politique de contrôle des exportations d’un an. Cela offre aux États-Unis un délai précieux. Pékin reprend également ses achats de soja américain, affaiblissant du même coup ses principaux atouts dans la guerre commerciale — cédez les restrictions et témoignez d’une volonté de compromis inhabituelle.
De plus, Pékin promet de renforcer la lutte contre les exportations de fentanyl, en réponse à la taxe américaine de 10 % ; en contrepartie, les États-Unis lèvent certaines restrictions sur des entreprises chinoises inscrites sur la « Entity List ».
Certes, il serait naïf d’attendre du PCC une lutte sincère contre le trafic de fentanyl. Au mieux, Washington pourrait observer une brève accalmie dans les flux entrants. Il n’empêche : ces gestes traduisent de sérieuses concessions côté chinois.
Peut-être la concession la plus marquante : Xi n’a pas évoqué la question de Taïwan lors de la rencontre, alors qu’elle aurait pu servir de monnaie d’échange contre des concessions sur les terres rares ou le soja.
Trump relance la chaîne mondiale des terres rares
La confiance avec laquelle Trump s’est présenté à la table des négociations s’explique en partie par ses avancées dans la reconstruction d’une chaîne d’approvisionnement mondiale en terres rares indépendante de la Chine.
Avant la rencontre, Trump avait signé des accords avec la Malaisie, la Thaïlande et le Japon pour coopérer sur les minerais critiques. Ces ententes ont pavé la voie aux discussions avec Xi et servi de levier clé côté américain. Elles garantissent aux acheteurs américains un accès prioritaire et stimulent le traitement local des terres rares, avec des clauses conçues pour contrer la domination chinoise dans le secteur. Ces accords commencent à réduire la dépendance de l’Asie du Sud‑Est au commerce chinois.
Réaction du PCC face au renforcement de l’alliance américano-japonaise
Le passage de Trump au Japon a renforcé l’alliance américano-japonaise, une démarche explicitement orientée contre Pékin. La réaction chinoise fut révélatrice : le ministère des Affaires étrangères a recouru à l’histoire de la Seconde Guerre mondiale comme argument défensif.
Lors d’une conférence de presse le 28 octobre, le porte-parole Guo Jiakun a critiqué la coopération sécuritaire américano-japonaise, appelant le Japon à « respecter les préoccupations sécuritaires des voisins » et à « réfléchir profondément à son histoire » [de la Seconde Guerre mondiale].
Aux yeux du PCC, l’alliance américano-japonaise représente un danger. Pourtant, son objectif est défensif : garantir la paix et la stabilité dans toute la région indo-pacifique. L’évidence : la source de l’instabilité n’est autre que le PCC lui-même.
M. Guo poursuit : « En raison de l’héritage du militarisme japonais, les politiques de défense japonaise suscitent depuis longtemps l’inquiétude chez ses voisins asiatiques et la communauté internationale. »
Ce discours illustre parfaitement la rhétorique habituelle du PCC. En contraste, 80 ans après la guerre, aucun pays européen ne demande à l’Allemagne de s’excuser pour son passé.
Le PCC revendique fièrement la victoire contre les troupes japonaises, ou du moins fait semblant. Mais, au fond, le parti n’a jamais pleinement assumé ce rôle de vainqueur, ce qui nourrit une mentalité de victime permanente. En réalité, durant le conflit, les communistes chinois ont souvent collaboré avec les troupes japonaises contre le gouvernement nationaliste, ce qui rend leur « victimisation » d’autant plus creuse.
Cette obsession d’un conflit vieux de 80 ans montre combien le Japon a changé depuis la guerre. Dès lors, la seule rhétorique que le PCC puisse opposer à Tokyo consiste à en rappeler les exactions du passé.
Une trêve tactique après la rencontre Trump–Xi
Malgré l’annonce d’un cadre commercial, certains observateurs y voient une simple trêve tactique, et non un véritable accord durable. Deux raisons à cela : d’abord, l’accord fait l’objet d’un réexamen annuel ; ensuite, les engagements sur les terres rares et le soja sont de court terme et risquent de ne pas être tenus.
Lors du premier mandat de Trump, Pékin n’a pas honoré des engagements similaires. Le vrai obstacle ne réside pas dans la difficulté à parvenir à un accord, mais dans l’absence d’assise pour un commerce normal entre les deux pays. Si un accord pérenne était possible, il n’y aurait pas besoin de révisions régulières.
États-Unis et Chine ont mené cinq tours de négociations similaires depuis mai 2025. Si un accord véritable devait advenir, il aurait déjà vu le jour. Ce qui bloque, c’est le modèle économique du PCC, incompatible avec une véritable réciprocité du marché. Dès lors, la négociation s’effectue thématique par thématique — terres rares, soja, semi-conducteurs —, aboutissant à des trêves temporaires plutôt qu’à un traité.
L’interdépendance entre économies américaine et chinoise rend impossible une rupture soudaine : la négociation doit se poursuivre.
Au fond, Trump et Xi doivent gérer les conséquences des choix de leurs prédécesseurs. Pour la Chine, les racines du problème remontent aux demi-mesures de réforme engagées dans les années 1980 et aux promesses non tenues lors de l’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Pour les États‑Unis, c’est la dissociation des questions de droits humains et de commerce, puis l’entrée de Pékin à l’OMC sans garde‑fou suffisant.
Désormais, la relation commerciale sino-américaine s’oriente vers une succession de trêves tactiques — temporaires, transactionnelles, renégociées sans cesse — plutôt qu’un accord durable, contraignant et réellement exécuté.
Pourquoi Pékin a-t-il cédé ?
La première raison tient à l’économie : depuis la pandémie, la reprise chinoise déçoit, et la pression des droits de douane américains aggrave la situation. Sans allègement, la croissance pourrait encore se dégrader, menaçant la stabilité du régime.
Autre élément : la tension politique. Autour du quatrième plénum du PCC, plusieurs officiers haut gradés et dirigeants locaux ont été évincés, révélant les tensions au sommet du pouvoir. Face à des défis internes et externes simultanés, Pékin ne pouvait se battre sur deux fronts. Une pause tarifaire permet à Xi de consolider son contrôle à l’intérieur.
Cela explique également pourquoi Xi s’est abstenu d’évoquer la question taïwanaise lors des pourparlers. Pour l’instant du moins, le PCC n’a ni la confiance ni la capacité nécessaires pour utiliser Taïwan comme monnaie d’échange.
Le cadre commercial Trump–Xi ne constitue pas une rupture dans la relation bilatérale, mais seulement une pause tactique. Il s’agit moins d’une manifestation de confiance mutuelle que de la nécessité pour Pékin de reprendre son souffle.
Michael Zhuang a contribué à cette analyse.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Heng He est commentateur à la radio Sound of Hope, analyste chinois pour l'émission « Focus Talk » de NTD et rédacteur pour Epoch Times.
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