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Le PCC nomme son chef de la lutte anticorruption à un poste militaire clé
Contrairement à son prédécesseur, le général Zhang Shengmin n’est pas considéré comme membre du clan de Xi Jinping.

Un policier paramilitaire chinois monte la garde devant le Grand Hall du Peuple, à Pékin, le 26 février 2025.
Photo: Pedro Pardo/AFP via Getty Images
Le responsable de la campagne anticorruption menée au sein de l’armée chinoise est devenu le numéro deux des forces armées, en reprenant une fonction laissée vacante après l’éviction d’un haut gradé largement considéré comme un proche allié du dirigeant chinois Xi Jinping.
Le général Zhang Shengmin, vétéran commissaire politique, a été officiellement promu le 23 octobre au poste de vice‑président numéro deux de la Commission militaire centrale (CMC), l’organe du Parti communiste chinois (PCC) qui contrôle l’appareil militaire.
La nomination a été annoncée à l’issue de la réunion à huis clos de quatre jours du Comité central, dite Quatrième plénière, qui a rassemblé plus de 300 hauts cadres du Parti pour tracer les orientations du nouveau plan de développement économique et social de la Chine. De tels conclaves entérinent aussi d’importants mouvements de personnel.
Quelques jours avant la réunion, la direction chinoise avait exclu le prédécesseur de M. Zhang, He Weidong, ainsi que huit autres généraux de haut rang, tous accusés de corruption et d’abus de pouvoir. Huit des neuf responsables purgés siégeaient au Comité central dirigeant du PCC.
Au conclave, le Comité central a confirmé les décisions antérieures de la direction de révoquer l’appartenance au Parti des huit généraux, selon le compte rendu officiel de la réunion publié par l’agence étatique Chine nouvelle.
Le document a également révélé que Zhang Fengzhong, responsable du travail politique au sein de la très secrète Force des fusées de l’Armée populaire de libération (APL), qui commande l’arsenal nucléaire du pays, était lui aussi pris dans la vaste campagne anticorruption.
M. Zhang est accusé de violations graves de la discipline du Parti et de la loi ; le Comité central a entériné une décision antérieure lui retirant son statut de membre du Parti, selon le compte rendu.
Depuis son arrivée au pouvoir en 2012, Xi a lancé une vaste campagne contre la corruption et la déloyauté présumées, faisant tomber certains de ses rivaux politiques les plus influents. Mais la récente offensive vise de plus en plus ses propres protégés et alliés de longue date, alimentant les spéculations sur des luttes de pouvoir au sommet du Parti.
Luttes internes
Le nouveau vice‑président de la CMC ne semble pas appartenir à une faction politique loyale à Xi, a indiqué à Epoch Times le commentateur des affaires chinoises Li Linyi. Cela tranche avec son prédécesseur direct, He Weidong, décrit par certains observateurs comme le premier confident de Xi au sein de l’institution militaire.
M. He n’avait pas été vu en public pendant environ sept mois avant d’être officiellement exclu du Parti et de l’armée la semaine dernière. Le motif invoqué par le porte‑parole du ministère chinois de la Défense au moment de sa destitution : de graves violations de la discipline du Parti et de lourdes infractions liées à l’exercice de ses fonctions, « impliquant des sommes extrêmement importantes ».
Le départ de M. He a laissé vacants un siège au Bureau politique, deuxième instance décisionnelle du Parti, et un poste au sein de la CMC. Si Zhang Shengmin a été nommé vice‑président de la CMC, il n’a pas été promu au Bureau politique, ce qui a surpris plusieurs analystes.
Shen Ming‑shih, spécialiste des questions militaires chinoises à l’Institut de recherche sur la défense et la sécurité nationales, un think tank financé par le gouvernement taïwanais, relie cette décision à la série de purges récentes dans l’appareil militaire, qui ont soulevé des interrogations sur la solidité de l’emprise de Xi sur l’armée.
Xi n’a pas voulu rendre les remaniements au sein du Parti « trop agités », a expliqué M. Shen à Epoch Times, ce qui pourrait avoir conduit à ne pas nommer M. Zhang au Bureau politique.
M. Zhang a gravi les échelons principalement comme officier politique de l’APL, occupant des postes non combattants chargés de la discipline politique et de la formation idéologique pour garantir la loyauté envers le Parti.
Depuis fin 2017, il siège comme membre ordinaire de la CMC et dirige sa Commission d’inspection disciplinaire, bras armé de la campagne anticorruption visant à purger l’APL des officiers jugés corrompus.
La montée en grade de M. Zhang dans l’appareil d’État doit encore être approuvée par l’Assemblée nationale populaire, le « parlement croupion » chinois, dont le comité permanent doit se réunir le 24 octobre.
Un organe militaire réduit à un seul membre ordinaire
Le compte rendu de la réunion du Parti laisse plus de questions qu’il n’apporte de réponses, selon M. Shen, qui étudie l’armée et la politique chinoises.
L’une des questions en suspens concerne l’éventuelle entrée du ministre de la Défense, l’amiral Dong Jun, au sein de la CMC, a‑t‑il noté.
Son absence — alors que, par convention, les ministres de la Défense y siègent — a intrigué les observateurs. Ancien chef de la marine, M. Dong a été nommé à son poste actuel en décembre 2023 après la disparition inexpliquée puis la destitution de son prédécesseur, Li Shangfu, ensuite accusé de corruption.
Dans le système chinois, le ministre de la Défense joue surtout un rôle protocolaire, orienté vers les relations avec les armées étrangères, tandis que le pouvoir de commandement effectif est exercé par la CMC. Au début du quinquennat en cours, fin 2022, cet aréopage comptait quatre membres ordinaires et deux vice‑présidents sous l’autorité de Xi.
Or, le ministre de la Défense n’ayant pas obtenu de siège et M. Zhang ayant été promu vice‑président, l’organe ne compte plus aujourd’hui qu’un seul membre ordinaire.
Pour Wang He, observateur de la Chine et contributeur d’Epoch Times, la décision des dirigeants de laisser vacants trois sièges au sein de la CMC témoigne d’une « concentration accrue » du pouvoir militaire.
Compte tenu du fait que deux commandants récemment purgés — He Weidong et Miao Hua — étaient réputés proches de Xi, M. Wang estime que le septuagénaire n’a plus qu’une influence limitée sur les nominations.
Le véritable pouvoir, dit‑il, semble être exercé par le général Zhang Youxia qui, à 75 ans, demeure le premier vice‑président de la commission.
Les luttes internes compliquent l’identification, par ce vétéran, de cadres de confiance, ce qui pourrait expliquer l’absence de nouvelles nominations lors du conclave de cette semaine, selon l’analyste.
« Si une personne de plus rejoint la Commission militaire centrale, ce pouvoir se divisera davantage », ajoute M. Wang, également commentateur des affaires chinoises.
À ce « moment critique », sans « candidat absolument fiable », Zhang Youxia n’a guère intérêt à faire entrer de nouveaux membres, préférant conserver une emprise serrée sur le pouvoir militaire, observe‑t‑il.
« L’arrangement actuel des postes aura un impact profond sur la situation politique au sein du PCC », conclut‑il.
Luo Ya a contribué à la rédaction de cet article.


Dorothy Li est journaliste pour Epoch Times.
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