L’avenir de la gauche en crise : tensions explosives à la Fête de l’Humanité

Lucie Castets (au centre), économiste et candidate du Nouveau Front populaire au poste de Premier ministre, entourée de plusieurs responsables de gauche : Manuel Bompard (LFI), Marine Tondelier (Écologistes), Guillaume Gontard (Écologistes), Stéphane Peu (PCF) et Olivier Faure (PS), à leur arrivée à l’Élysée, le 23 août 2024.
Photo: Dimitar Dilkoff / AFP via Getty Images
La Fête de l’Humanité a été le théâtre samedi d’un débat particulièrement houleux qui illustre la profonde crise traversée par la gauche française.
La question de l’union des forces de gauche semble aujourd’hui plus compromise que jamais, les échanges entre les représentants des différentes formations ayant révélé des fractures qui paraissent difficiles à colmater.
Un face-à-face révélateur des divisions
Sur la scène se trouvaient réunis les principales figures de la gauche : Olivier Faure pour le Parti socialiste, Marine Tondelier d’Europe Écologie-Les Verts, Stéphane Peu représentant les députés communistes, ainsi que François Ruffin et Hadrien Clouet pour La France insoumise. Ce qui devait être un débat sur l’avenir de la gauche s’est transformé en un règlement de comptes particulièrement âpre.
Le PS accusé de « trahison »
Hadrien Clouet a mené l’offensive contre les socialistes, prolongeant ainsi la campagne de critiques menée par LFI sur les réseaux sociaux depuis plusieurs semaines. Le député insoumis a accusé le PS de « trahison » pour avoir exprimé sa disponibilité à gouverner dans un esprit de compromis, avant même la nomination de Sébastien Lecornu à Matignon. Cette position pragmatique du PS, qui prend acte de l’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale, est perçue par LFI comme une capitulation face au macronisme.
L’accord Bayrou au cœur des reproches
L’accord de non-censure conclu en début d’année entre l’ancien Premier ministre François Bayrou et les socialistes cristallise particulièrement les tensions. Qualifié de « catastrophique » par Hadrien Clouet, cet accord symbolise aux yeux des insoumis une dérive du PS vers ce qu’ils dénoncent comme une « union bourgeoise » avec la macronie. Le député LFI s’est également attaqué aux « contre-budgets capitulards » des socialistes, multipliant les formules chocs pour marquer sa désapprobation.
Gaza, pomme de discorde persistante
Les divergences sur le conflit israélo-palestinien continuent d’empoisonner les relations au sein de la gauche. Hadrien Clouet a relancé la polémique en affirmant que « la fin de la Nupes a été orchestrée par ceux qui niaient qu’il y avait un génocide à Gaza », une attaque directe contre le PS qui avait décrété un « moratoire » sur l’alliance de gauche après les attaques du 7 octobre 2023.
Cette rupture s’expliquait notamment par le refus de LFI de qualifier le Hamas d’organisation « terroriste », une position qui avait provoqué l’ire des autres formations de gauche. Olivier Faure a tenté de clarifier la position socialiste, rappelant que son parti avait bien reconnu l’acte terroriste perpétré par le Hamas, tout en réfutant les accusations d’un soutien inconditionnel à Israël. Le secrétaire général du PS a par ailleurs dénoncé les « trolls » insoumis qui accusent les socialistes de tiédeur sur la question palestinienne.
Des tentatives de réconciliation face aux divisions
Malgré ces tensions, quelques voix se sont élevées pour appeler au dépassement des querelles. Stéphane Peu, président des députés communistes, a mis en garde contre des divisions « inconséquentes », exhortant ses collègues à se concentrer sur « l’essentiel » plutôt que sur « l’accessoire ». Il a également interpellé directement LFI : « Depuis quand on mégote contre une avancée sociale ? »
Marine Tondelier, traditionnellement favorable à l’union de la gauche, a reconnu que la question de la destitution d’Emmanuel Macron, cheval de bataille de LFI mais qui divise le PS, « commence à se poser ». Cette évolution témoigne de la radicalisation progressive du débat politique.
François Ruffin, qui a quitté LFI l’année dernière en désaccord avec la stratégie du mouvement, a appelé à lutter contre le « sectarisme » et la « chasse aux traîtres », plaidant implicitement pour une approche plus inclusive et moins clivante.
Ces échanges témoignent des difficultés persistantes de la gauche à surmonter ses divisions idéologiques et stratégiques pour présenter une alternative crédible face aux défis politiques actuels. L’union semble plus que jamais compromise.
Avec AFP

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