Dermatose nodulaire
La vaccination de 750 000 bovins en urgence : un défi logistique et humain considérable
Face à l'urgence sanitaire, le gouvernement lance une opération d'ampleur inédite : vacciner 750 000 bovins contre la dermatose nodulaire en quelques semaines seulement. Un défi logistique considérable qui nécessite de ratisser large en termes de personnel.

La ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Annie Genevard (2e à g.), visite une exploitation agricole GAEC (Groupement agricole d'exploitation en commun) lors d'une campagne de vaccination du bétail à Chaussenans, dans l'est de la France, le 17 octobre 2025.
Photo: ARNAUD FINISTRE/AFP via Getty Images
« Cette campagne devra mobiliser de façon tout à fait exceptionnelle, outre les vétérinaires des services de l’État, des vétérinaires volontaires, libéraux, retraités, en activité, de toute la France, des vétérinaires militaires (…) et également des élèves des écoles vétérinaires », a annoncé la ministre de l’Agriculture Annie Genevard mardi soir, après deux réunions de crise à Matignon.
L’ampleur de cette campagne dépasse largement celle menée précédemment en Savoie, où environ un million de bêtes avaient été vaccinées pour 20 millions d’euros.
Onze départements dans la ligne de mire
La vaccination s’étendra sur deux zones distinctes. D’abord, les départements déjà touchés par la maladie : Ariège, Aude, Haute-Garonne, Hautes-Pyrénées et Pyrénées-Orientales. Ensuite, le « cordon sanitaire » composé du Gers, de l’Hérault, des Landes, des Pyrénées-Atlantiques et du Tarn, où l’immunisation sera préventive.
« Cela concerne 750 000 bovins et nous nous assurerons d’une vaccination la plus rapide possible », a précisé Annie Genevard. L’Ariège servira de test grandeur nature avec un objectif clair : vacciner intégralement les 1 000 exploitations du département d’ici le 31 décembre.
La bataille des doses de vaccin
Premier obstacle de taille : assurer l’approvisionnement en vaccins, qui ne sont pas fabriqués sur le territoire français. Le gouvernement a commandé un million de doses supplémentaires, qui s’ajouteront aux 500 000 déjà en cours d’acheminement ou déployées dans le Sud-Ouest.
L’urgence est telle que le ministère des Armées a été réquisitionné en pleine nuit pour rapatrier 400 000 doses depuis les Pays-Bas, où elles sont conditionnées.
Une vaccination nationale en dernier recours
Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, principal syndicat agricole, a tempéré mercredi sur France Inter concernant une éventuelle vaccination de l’ensemble du cheptel français (près de 16 millions de têtes).
« Si c’est la seule solution, il faudra le faire. Pour peu que, un, on ait les vaccins, ce qui n’est pas nécessairement le cas aujourd’hui, et que, deux, on n’ait pas d’alternative », a-t-il déclaré, soulignant les risques pour les prix et les revenus des éleveurs.
Chaque dose coûte environ 1,40 euro, auxquels s’ajoutent les frais vétérinaires et de surveillance. L’immunité devient pleinement efficace 28 jours après l’injection.
Des défis logistiques de taille
Si l’hiver facilite l’accès aux animaux par rapport à la période estivale et aux vaches en estive, le volume à traiter reste impressionnant. En Savoie, la vaccination de 200 000 bêtes avait nécessité plusieurs semaines, compliquée par l’altitude des pâturages.
L’Occitanie présente une difficulté supplémentaire : la région compte surtout des vaches allaitantes, destinées à la reproduction plutôt qu’à la production laitière. Contrairement aux vaches laitières qui reviennent quotidiennement à l’étable pour la traite, elles sont moins régulièrement rassemblées.
Une armada de praticiens sur le pont
Pour pallier la pénurie de vétérinaires ruraux, tous les moyens sont bons. « Nous allons mobiliser le service de santé des armées », a confirmé Catherine Vautrin mardi soir. L’armée dispose d’environ 70 vétérinaires, mais leur degré de mobilisation reste à préciser.
Un ancien préfet, Pascal Sanjuan, a été nommé à la tête d’une cellule interministérielle chargée d’accélérer la campagne. Les préfets devront quant à eux élaborer des plans départementaux détaillés.
Entre obligation et diplomatie
La vaccination est obligatoire. En octobre, Annie Genevard avait prévenu que celle-ci serait « imposée » aux récalcitrants, avec des sanctions à la clé : amendes ou suppression des indemnités d’abattage. Les contrôles des mouvements d’animaux ont d’ailleurs été intensifiés ces derniers jours.
Toutefois, face aux menaces reçues par certains vétérinaires, la ministre a exclu mercredi qu’ils soient escortés par des gendarmes lors de leurs interventions dans les exploitations, afin d’éviter toute escalade des tensions.
Avec AFP

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