24 heures à Nagazaki

Détail d’une sculpture représentant une femme entourée de colombes dans le Parc de la Paix de Nagasaki.
Photo: Sandra Foyt/Shutterstock
Nagasaki, au Japon, a bien plus à offrir que son histoire liée à la Seconde Guerre mondiale. Entourée par la splendeur volcanique et montagneuse de l’île méridionale de Kyūshū, cette ancienne ville portuaire d’environ 400 000 habitants s’étire le long de mers étincelantes. Avec ses plages cachées, ses palmiers ondoyants, ses ports animés et ses îles mystérieuses, Nagasaki regorge de trésors à découvrir, savourer et explorer.
Ici, les strates du passé sont multiples. Fondée par les Portugais en 1571, la ville est restée ouverte au commerce international à une époque où le reste du pays s’était refermé. L’influence européenne et chrétienne y demeure profonde. Puccini y a situé l’action de « Madame Butterfly », et non loin des côtes, on peut même visiter le repaire d’un célèbre méchant de James Bond. Et, bien sûr, il y a le Parc de la Paix, ainsi qu’un pan entier d’histoire à revisiter autour de la guerre du Pacifique. Une seule journée ne suffit pas pour tout voir, mais voici notre guide pour profiter au mieux de Nagasaki en seulement 24 heures.
Arrivée
On n’atterrit pas dans beaucoup d’endroits comme l’aéroport de Nagasaki (NGS), le tout premier grand aéroport maritime au monde. Inauguré en 1975, sa construction dans la baie d’Ōmura fut un projet colossal. Les ingénieurs ont nivelé les collines de l’île de Mishima et complété l’ensemble avec des terres récupérées sur la mer. Ils ont érigé le pont Mishima Ōhashi, qui s’étire sur plus de 800 mètres pour relier NGS au continent.
La majorité des vols y sont domestiques, avec seulement quelques liaisons internationales. Pour rejoindre le centre-ville par la route, on peut prendre un taxi ou un bus. Mais, à vrai dire, le ferry est probablement une option plus agréable : il suffit de se rendre à l’embarcadère, et l’on accoste au port continental de Togitsu en une vingtaine de minutes.
Matin
Après ce qui fut probablement un très long vol, troquez les contraintes de l’avion contre les brises salées du quai de Dejima, à environ onze kilomètres au sud de Togitsu. Un petit en-cas et un peu de caféine seront sans doute bienvenus pour atténuer les effets du décalage horaire. Faites une halte chez Attic Coffee pour un latte ou un cappuccino, voire une gaufre, idéale à savourer à l’une des tables donnant sur les voiles blanches qui s’agitent dans le port animé.
De là, le Seaside Park de la ville s’étend juste au sud. Ce vaste espace vert d’environ 6,5 hectares invite à une promenade le long du front de mer. Faites ensuite une boucle, en passant devant les cascades, une petite île bordée de fleurs, puis le long du canal qui traverse le parc.
Ce n’est pas une longue marche, mais elle devrait suffire à éveiller les sens – et à vous préparer pour un peu d’histoire.

Le pont Megami Ōhashi de Nagasaki est le sixième plus grand pont à haubans du Japon. (Julien Moraine/Shutterstock)
Commencez par grimper dans les rues proches, densément bâties, pour y découvrir un spectacle rare au Japon : les flèches élancées d’une grande église. La cathédrale d’Ōura se dresse comme un témoignage de la présence européenne et de l’histoire singulière du christianisme dans cette ville. Elle est splendide.
Supervisée par deux prêtres français, la construction de la première église sur ce site s’est achevée en 1864, et la version gothique actuelle a vu le jour à la fin des années 1870. Les vitraux ont été importés de France. Depuis, l’édifice a été agrandi, classé Trésor national, et il est aujourd’hui considéré comme le plus ancien site chrétien du Japon. Le musée attenant, consacré à l’histoire du christianisme dans le pays, mérite qu’on lui consacre un peu de temps.

Des passants visitent des boutiques, tandis que la cathédrale d’Ōura, également appelée église d’Ōura, se dresse en arrière-plan. (Nigel Jarvis/Shutterstock)

Le Glover Garden est l’une des principales attractions touristiques de Nagasaki. (Nirad/Getty Images)
Il reste encore tant à découvrir. Faites une brève excursion un peu plus haut sur la colline pour prendre une photo du Glover Garden et de la Résidence Glover, autrefois élégante demeure de Thomas Blake Glover, un industriel du XIXᵉ siècle – qui a contribué à la modernisation du Japon. Sa maison est la plus ancienne construction en bois de style occidental du pays, et les jardins perchés qui l’entourent sont aérés et magnifiques – un véritable havre de fraîcheur dans cette ville souvent accablée par la chaleur.
Redescendez ensuite la colline, en vous préparant à une fin de matinée lourde de sens, mais porteuse d’espoir. Le 9 août 1945, un bombardier B-29 nommé Bockscar largue une bombe atomique sur la ville. Fat Man (nom de code de la bombe A) explose à 11 h 02. Le souffle initial et les retombées radioactives font plus de 100 000 morts.
Et pourtant, une visite au Parc de la Paix se révèle étonnamment réconfortante. Pour gagner du temps, prenez un taxi vers le nord : les 5 kilomètres jusqu’au parc se parcourent en moins de 15 minutes.
Commencez par le remarquable Musée de la bombe atomique, qui retrace l’histoire du drame. Les récits personnels, les photographies d’époque et, surtout, les objets retrouvés donnent à cette journée tragique une dimension profondément humaine.

La statue de la Paix de Nagasaki, dans le Parc de la Paix de Nagasaki. (Tayawee Supan/Unsplash)

Le Musée de la bombe atomique de Nagasaki présente le contexte historique et les effets de la bombe, notamment les radiations et la vague de chaleur. (jack_photo/Shutterstock)

Un visiteur observe des images d’archives au Musée de la bombe atomique de Nagasaki. (f11photo/Shutterstock)
On y découvre des scènes lumineuses de la matinée précédant le largage de la bombe, une maquette de Fat Man, des cartes montrant l’étendue des destructions, des reconstitutions de la majestueuse cathédrale d’Urakami et de la tour de guet, ainsi qu’une horloge retrouvée dans une maison, figée à la minute exacte où tout a basculé.
Poursuivez ensuite votre chemin à travers le Parc de la Paix. On y trouve une cloche que l’on peut faire sonner en soutien à la paix dans le monde, une fontaine de la paix, et de nombreux monuments offerts par des pays du monde entier. Dominant l’ensemble, se dresse une statue spectaculaire de neuf mètres de haut, œuvre du sculpteur originaire de Nagasaki, Seibō Kitamura. Une jambe repliée en posture de méditation, l’autre avancée pour symboliser l’aide. Une main levée vers le ciel, en signe d’avertissement contre la mort venue d’en haut.
Après-midi
Après cette fin de matinée empreinte de gravité, reprenez la direction du bord de mer. Prenez un ramen rapide ou peut-être un peu de sushi près de l’embarcadère. Puis embarquez à bord d’un bateau au port de Tokiwa en direction de Battleship Island.
Officiellement appelée Hashima (ou Gunkanjima), cette île classée au patrimoine mondial de l’UNESCO a inspiré la « ville morte » dans le film Skyfall. Dans ce long-métrage de 2012, James Bond – incarné par Daniel Craig – y rencontre le méchant du film, Raoul Silva.
Naviguez sur huit milles nautiques en mer de Chine orientale, et laissez-vous saisir par l’histoire réelle, tout aussi troublante. La reconnaissance par l’UNESCO est liée à la révolution industrielle Meiji. À la fin du XIXᵉ siècle, des mineurs extrayaient du charbon dans les galeries sous-marines. On y employait également des travailleurs forcés venus de Corée, contraints de récolter le minerai.

Bâtiments abandonnés sur l’île de Gunkanjima, également connue sous le nom de Battleship Island, près de Nagasaki. (AlanMorris/Shutterstock)
À la fin des années 1950, la population atteignait plus de 5 000 habitants. À cette époque, Hashima – surnommée Gunkanjima, en raison de sa ressemblance frappante avec un cuirassé – était une communauté florissante. Des immeubles d’habitation en hauteur s’y dressaient. Mais en 1974, le charbon s’est épuisé. L’île, jadis l’un des endroits les plus densément peuplés au monde, fut entièrement abandonnée.
À l’approche depuis la mer, sa silhouette est à la fois étrange et fascinante. Les excursions durent généralement environ trois heures. Les guides commencent par relater l’histoire pendant que le bateau longe les rivages. Puis vient le moment fort : la possibilité de débarquer et de parcourir les ruines en suivant un itinéraire balisé avec soin. Les récits entendus restent en mémoire – ceux qui évoquent le quotidien de cette vie passée, dans ce lieu vide, étrangement beau.
Soirée
De retour à quai, vous avez encore le temps de visiter Dejima, situé à moins de 15 minutes à pied de Tokiwa. Ce musée en plein air reste ouvert tard. La chaleur de l’après-midi commence à tomber, rendant la visite particulièrement agréable.
« C’est un fragment d’Europe au Japon », expliquait récemment un guide. Autrefois entièrement artificielle, Dejima était une île créée de toutes pièces, aujourd’hui rattachée au continent et intégrée à Nagasaki. En raison des travaux de remblaiement, les bâtiments se trouvent désormais un peu plus à l’intérieur des terres, le long de la rivière Nakashima. Du XVIIᵉ au XIXᵉ siècle, pendant l’époque d’Edo, le Japon suivait une politique d’isolement, fermé au reste du monde. À l’exception de Nagasaki – et de Dejima.

Huis Ten Bosch recrée un morceau des Pays-Bas à Nagasaki, au Japon. (jack_photo/Shutterstock)

Le quai de Dejima, qui offre une vue sur la baie du port de Nagasaki, compte une demi-douzaine de restaurants. (Sanga Park/Shutterstock)
Construite à l’origine par les Portugais, cette île fut pendant la majeure partie de son histoire un comptoir commercial hollandais, avec des échanges de marchandises vers Batavia, aujourd’hui Jakarta, en Indonésie. En déambulant parmi les anciens entrepôts et résidences, on peut presque imaginer ce qu’était la vie d’un marchand installé ici.
Vous voilà arrivé à la fin de cette soirée et devez maintenant faire un choix. Cette journée aura déjà été plus chargée que la plupart. Il serait sans doute sage de simplement trouver une bonne izakaya à proximité. Plusieurs établissements proposent ces tapas japonaises, à accompagner peut-être d’un shōchū, cet alcool savoureux distillé à Kyūshū. Installez-vous au comptoir, commandez un sashimi ultra-frais, et portez un toast avant d’aller vous coucher.

Un plateau de délices japonais. (Takafumi Yamashita/Unsplash)
Toutefois, si vous avez encore un soupçon d’énergie, prenez le téléphérique jusqu’au sommet du mont Inasa. De là-haut, en regardant le port, Nagasaki scintille de mille feux. Fermez les yeux. Clignez des paupières une ou deux fois. Puis laissez-vous envahir par le souvenir de toutes ces nouvelles expériences, vécues en seulement une journée, au cœur du Japon méridional.
À propos de la langue
Soyez prêts. Même dans les commerces en contact avec la clientèle, comme les hôtels, et surtout dans les restaurants, les habitants de Nagasaki – une ville plus petite et éloignée de Tokyo – ne parlent pas toujours anglais. Gardez donc vos applications de traduction à portée de main. Et apprenez quelques mots de japonais, notamment bonjour (« konnichiwa ») et merci (« arigatō »).
Visitez les sources chaudes
Kyūshū est une île volcanique, et plusieurs onsen, ces sources chaudes japonaises, se trouvent à proximité de Nagasaki. Les visiter est à la fois relaxant et instructif. Le pays cultive une véritable tradition autour de ces bains. Attention : les tatouages sont généralement interdits. La nudité est habituellement requise. Il faudra également suivre un rituel de douche et de purification avant d’entrer dans les bassins.
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