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Le parc national des monts Great Smoky : un patrimoine historique préservé

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La cabane de Carter Shields compte parmi les nombreuses habitations que l’on peut encore découvrir au cœur du parc national des monts Great Smoky.

Photo: Crédit photo Deena Bouknight

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Durée de lecture: 8 Min.

Dans les Appalaches, aux confins du Tennessee et de la Caroline du Nord, le parc national des monts Great Smoky attire chaque année des millions de visiteurs. Si ses panoramas, ses cascades et ses sentiers en font l’un des hauts lieux du tourisme américain, il se distingue aussi par un autre atout, plus discret : la sauvegarde d’un patrimoine historique et culturel unique.
Le parc le plus visité des États-Unis
Avec plus de 12 millions de visiteurs en 2024, les monts Great Smoky sont devenus le parc national le plus fréquenté du pays, selon le Service des Parcs Nationaux. Routes panoramiques, boucles cyclables, randonnées à l’infini, cascades spectaculaires et rencontres avec la faune composent une offre de loisirs abondante. Mais derrière ce décor naturel, le parc se révèle aussi comme un lieu de mémoire.

Son centre des visiteurs raconte l’histoire des Amérindiens et des colons qui ont occupé ces montagnes avant la création du parc en 1934. Sur près de 2000 km², ce sont 123 bâtiments historiques et 147 cimetières familiaux qui jalonnent aujourd’hui le territoire, témoignant de la vie quotidienne de communautés disparues.

Plusieurs cascades telles qu’Abrams Falls se trouvent dans le parc national le plus visité des États-Unis. (Crédit photo Deena Bouknight)

Un musée à ciel ouvert

À l’entrée de Cherokee, en Caroline du Nord, le centre des visiteurs Oconaluftee, un bâtiment de 585 m² expose outils, vêtements et photographies du XIXᵉ siècle, mais aussi le rôle joué par le Civilian Conservation Corps (Corps civil de protection de l’environnement) dans les années 1930 et 1940. Ces jeunes ouvriers ont construit les routes, les murets et les bâtiments qui structurent encore aujourd’hui le parc.

À deux pas de ce centre d’accueil des visiteurs, l’un des quatre du parc, se trouve le Mountain Farm Museum. Ce musée, datant de plus de 100 ans, abrite une ferme en rondins reconstituée avec ses granges, son cellier, sa forge. Déplacés dans les années 1950 depuis le parc, les bâtiments, les outils agricoles et les vestiges de l’équipement de ce site permettent aux visiteurs de comprendre clairement comment vivaient les familles bien avant l’avènement des technologies et des commodités modernes.

Les vestiges d’une base de mât de drapeau du CCC dans le parc national des monts Great Smoky. (Crédit photo Deena Bouknight)

Témoins du passé
À l’intérieur du parc, que l’on y accède par la Caroline du Nord ou par le Tennessee, le visiteur peut découvrir au fil des routes et des sentiers de vieilles maisons en rondins ou à ossature en bois, des granges, des dépendances, des églises, des écoles et des moulins à grains. Nombre de ces bâtiments sont ouverts au public et la plupart s’accompagnent de panneaux pédagogiques relatant leur histoire : date de construction, artisans qui les ont érigés, familles qui les ont habités ou utilisés, ainsi que les particularités de leur style architectural et de leurs techniques de bâtissage.

Plusieurs de ces édifices, nichés au cœur des forêts ou bordant l’un des innombrables cours d’eau du parc, ont été construits à partir de châtaigniers d’Amérique issus de peuplements anciens. Cette essence a presque été totalement décimée dans les années 1930 par ce que l’on appela la « maladie du châtaignier ». Ces rares bâtiments constituent aujourd’hui quelques-uns des derniers témoins de la construction en bois de châtaignier dans l’ensemble des Appalaches.

Une plaque commémorative rend hommage aux hommes qui ont construit les nombreuses installations du parc national des monts Great Smoky. (Crédit photo Deena Bouknight)

Deux demeures emblématiques
La maison en rondins de John E. Davis, visible au Mountain Farm Museum, a été construite en bois de châtaignier d’Amérique et s’élevait sur un étage et demi. Les rondins étaient assemblés grâce à une technique d’encoches en demi-queue-d’aronde, couramment utilisée pour assurer une parfaite stabilité. Les interstices entre les pièces de bois n’étaient pas comblés par le mortier d’argile, typique de la région, mais par de fines planches fendues à la main. D’autres bâtiments historiques témoignent, eux, d’une pratique consistant à empiler les rondins de manière si serrée qu’aucun espace ne subsistait.

Si la demeure de John E. Davis était considérée comme vaste pour une maison en rondins, le modèle le plus courant ressemblait davantage à la cabane de John Ownby. Elle a été construite en 1860 et est la seule maison existante dans ce qu’on appelait autrefois la communauté de Sugarland, dans une partie du parc du Tennessee. D’un seul niveau et dotée d’un plan ouvert, elle illustre l’architecture typique des habitations érigées par les premiers colons de la région. Contrairement à la maison de John E. Davis, elle n’a pas été construite en châtaignier d’Amérique, mais avec des essences locales plus accessibles, comme le pin blanc et le tulipier de Virginie.

L’entrée du parc national des monts Great Smoky. (Crédit photo Dreamstime/TNS)

Héritages de pierre et de bois
La cabane de Carter Shields, à Cades Cove, incarne une autre facette de ces constructions. Élevée sur des piliers de pierres pour protéger le plancher de l’humidité et permettre la circulation de l’air, elle rappelle des usages pratiques où même les chiens trouvaient refuge. Les toits pentus empêchaient l’accumulation de neige, tandis que les cheminées de pierre, assemblées au mortier d’argile, traduisaient un savoir-faire patient et précis.

Au XIXᵉ siècle, les toits dans les Appalaches étaient fortement inclinés afin d’empêcher l’accumulation de neige. Les cheminées, quant à elles, étaient construites avec des pierres de champs ou de rivières, soigneusement agencées et consolidées à l’aide d’un mortier d’argile.

Ces vestiges ne sont pas de simples curiosités touristiques. Ils sont les témoins d’un monde disparu, celui de familles qui vivaient de la terre, priaient dans ces montagnes et y ont trouvé leur dernier repos. En arpentant les monts Great Smoky, le promeneur ne contemple pas seulement des paysages somptueux : il entre aussi en dialogue avec une mémoire, inscrite dans le bois et la pierre, que le parc s’efforce de préserver.

Journaliste-écrivain depuis plus de 30 ans, Deena C. Bouknight travaille depuis son chalet dans les montagnes de l'ouest de la Caroline du Nord. Elle a écrit des articles sur la culture culinaire, les voyages, les gens et bien d'autres choses encore pour des publications locales, régionales, nationales et internationales. Elle a aussi écrit trois romans, dont le seul roman historique sur le pire tremblement de terre de la côte est américaine.

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