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Crise persistante à Paris : à quel point la zone euro est-elle menacée ?

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Le Premier ministre français sortant, Sébastien Lecornu, qui a présenté la démission de son gouvernement au président Macron, arrive pour faire une déclaration à l'Hôtel Matignon à Paris, le 6 octobre 2025. Emmanuel Macron a accepté sa démission, mais la composition du gouvernement, pratiquement inchangée, qu'il a dévoilée tard dans la soirée du 5 octobre 2025, a été vivement critiquée par l'ensemble de la classe politique.

Photo: Stéphane MAHE/POOL/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 6 Min.

Avec la poursuite de la crise d’instabilité au gouvernement et un Premier ministre épuisé, l’assainissement des finances publiques est encore reporté : la crise politique en France s’enlise. La deuxième économie de la zone euro menace-t-elle la stabilité de la zone monétaire ?

Pourquoi la situation en France est-elle si précaire ?

En termes de performance économique, la France affiche le troisième taux d’endettement le plus élevé de l’Union européenne après la Grèce et l’Italie, avec 114 % de taux d’endettement.
Les économistes de la Commerzbank mettent en garde : sans réformes, le taux d’endettement de l’État français pourrait dépasser « largement les 150 % » au cours des dix prochaines années.
En chiffres absolus, le pays est accablé par la dette la plus élevée de la zone euro, avec environ 3300 milliards d’euros. Les dépenses publiques sont également parmi les plus élevées d’Europe. Le déficit budgétaire s’élevait récemment à 5,8 %.
En juillet 2024, la Commission européenne a ouvert une procédure de déficit excessif à l’encontre de la France.

Comment les marchés réagissent-ils à ce nouvel échec du gouvernement ?

La démission du Premier ministre français après seulement quatre semaines en fonction a semé le trouble sur les marchés financiers. Lundi, les marchés boursiers français ont enregistré des pertes, l’indice de référence Cac 40 ayant notamment baissé. Les valeurs bancaires ont été particulièrement touchées.
La démission surprise de Sébastien Lecornu n’a pas perturbé le marché boursier allemand. Dans l’ensemble, les réactions du marché sont restées modérées. « En fin de compte, les marchés financiers tiennent compte de l’instabilité politique », explique Thomas Gitzel, économiste en chef de la VP Bank du Liechtenstein.

La France risque-t-elle de connaître une situation similaire à celle de l’Italie ?

Quel que soit le futur dirigeant à Paris, les nouvelles dettes coûteront de plus en plus cher à la France. Le pays doit offrir aux investisseurs des taux d’intérêt toujours plus élevés pour les nouvelles obligations d’État. De plus, l’absence de perspectives de réformes politiques freine la demande d’obligations françaises.
Les taux d’intérêt des obligations françaises sur les marchés financiers ont considérablement augmenté cette année. Lundi, les rendements des obligations françaises à dix ans ont atteint 3,60 %. Pour les obligations d’État allemandes, ils s’élèvent à 2,71 %. Les rendements des obligations françaises sont désormais supérieurs à ceux des titres comparables des pays du sud de l’Europe tels que l’Italie ou la Grèce.

Dans quelle mesure les jugements des agences de notation aggravent-ils la crise ?

En pleine crise budgétaire, la France a vu sa note de crédit par l’agence de notation Fitch abaissée à la mi-septembre. La solvabilité de la deuxième économie de la zone euro a été abaissée de AA- à A+. Cela rend encore plus difficile pour le pays de se procurer des fonds frais sur le marché des capitaux.
Fitch a justifié cette décision par les faibles chances de succès des réformes économiques, en raison de la polarisation et de l’instabilité de la politique intérieure du pays : « Nous pensons que la période précédant l’élection présidentielle de 2027 limitera encore davantage la marge de manœuvre pour la consolidation budgétaire dans un avenir proche et nous estimons très probable que l’impasse politique se poursuive après les élections. »

La France va-t-elle devenir un danger pour la zone euro ?

La crise politique reste limitée à la France et n’a que peu d’impact sur les autres pays de la zone euro, commente Peter Goves, spécialiste des obligations chez MFS Investment Management. Les économistes bancaires estiment également que le risque d’une nouvelle crise dans l’ensemble de la zone euro est faible, notamment parce que la Banque centrale européenne (BCE) dispose de nombreux instruments pour intervenir en cas d’urgence.

La BCE peut-elle aider le pays ?

Dans le cadre de l’« instrument de protection de la transmission » (TPI), la Banque centrale européenne pourrait acheter sans limite les obligations de certains États membres de la zone euro en cas de crise. Lorsqu’une banque centrale achète des obligations d’État à grande échelle, l’État concerné n’a pas besoin d’offrir des taux d’intérêt aussi élevés pour ses titres et peut obtenir de l’argent frais à moindre coût. Toutefois, le TPI est prévu pour les cas où les taux d’intérêt des obligations augmentent de manière disproportionnée en raison de la spéculation financière, et non parce qu’un gouvernement prend de mauvaises décisions en matière de politique financière.
Sans mentionner directement la France, les gardiens de la monnaie unique ont évoqué le TPI, après leur dernière réunion mi-septembre, qui leur offre la possibilité de « contrer les dynamiques de marché injustifiées et désordonnées ». Interrogée à ce sujet, la présidente de la BCE, Christine Lagarde, n’a pas souhaité s’étendre sur la situation politique dans son pays d’origine. Elle a simplement exprimé son espoir que les décideurs politiques feraient tout leur possible pour « réduire autant que possible l’incertitude ».
Avec dpa/red